Archives

  • cri

    mamamama chante l’enfant au visage qu’il ne voit pas
    derrière, sa maman placidement pousse
    les femmes qu’il fixe, mères le temps d’un cri
    le poissonnier s’impatiente, je vous en mets combien
    ses doigts plastique, nerveux dans son thon.

  • temps, contrejour de désolation.

    enlace la ville, son outrance
    tu sursautes d’étreinte humaine
    prends mer et retiens
    enlace pierre mercure et vaguelettes
    tu t’absentes écriture liquide
    mais le temps enserre et faille
    temps, contrejour de désolation.

  • sommes-nous (4)

    sommes-nous raidis, creusés de trop de mots
    failles de nos regards obèses, sans écorce de pensée
    nous flânons, entre filiation et absence
    pris dans une chair vaine comme univoque tissu
    usés de cendres, on tremble éventrés
    sommes-nous remous de nuages gelés
    vertèbres de pluie quand l’heure se tait
    sommes-nous parenthèses de vent
    sur des visages sans consolation
    qui scrutent et nous évitent
    on tremble
    on tremble des os.

  • calque de réel, ma folle excitation d’y troquer son soi.

    rues croisées, je ne sais rien
    comme penser sans alphabet
    le front s’acharne mais l’instant est masse, refuse tout solfège
    perdue en terre de commune langue
    calque de réel, ma folle excitation d’y troquer son soi
    exceptés les pieds, tristes à la traîne

  • j’aboie l’absence.

    de lieu commun en éclat de sens, mots se délient
    je chute, tendue comme brutalité de rêves
    je crie, verticale liturgie des fins
    l’ombre des seuils écoule ses jours affranchis
    mes récifs d’instants sustentent le temps d’impatience

    je suis brume lente, pensée de biais
    ma douleur tangue sur la main, opaque comme veines
    regarde la folie courir sur les doigts, mais palpe-la donc
    vulnérable peau ne retient les visages
    ils me reviennent et hantent

    je suis cap de silence; à tout retour, peines
    le hasard veut que j’aboie l’absence
    tout tu, j’invoque la peur, j’en suis pleine
    implore le geste qui manque
    j’ai mal à ma mort

    je chute, idée informe

    la vidéo réalisée avec ce texte est également visible ici:

    https://graciabejjani.fr/2019/07/30/jaboie-labsence-video/
  • soupir.

    doigts soupirent dans mes cheveux, pulpes du geste
    je ne vérifie pas
    par crainte de nous fourvoyer poussière
    implacable réel

  • entre tes poings.

    reviens, avant 
    mère dit 
    reviens avant, sans mot après l’avant 
    elle s’arrête avant 
    comme qui faute déjà 
    s’empêche comme pardon 
    s’empêche prolixe 
    reviens, avant 
    entre reviens et avant, pause comme frange 
    je trébuche dans tes petits silences 
    reviens, avant 
    elle dit, voix basse, courte 
    honte de quoi 
    tu supplies et ça condamne 
    ta voix d’à peine 
    me frémit monstre, comment je peux si loin 
    reviens 
    un avant sans date sans mois 
    avant et c’est furtif abîme d’une fin qui s’élude 
    peur de ta mort, mon épouvante 
    je dois te taire, démanteler l’instant 
    tamiser l’obsession du reviens 
    fanatique amour tiens 
    ma vie dans tes rêves insolubles 
    reviens, avant 
    l’absolu avant, comme reviens de suite 
    comme reviens à avant 
    avant, ma petite 
    reviens, césure 
    suspendue en filets de lettres 
    quand tu m’implores tu me broies 
    mortier de mots 
    je me hâte de quitter revenir 
    ta petite, dans tes poings.

    la vidéo réalisée avec ce texte est également visible ici:

    https://graciabejjani.fr/2019/07/21/entre-tes-poings-video/
  • j’aboie l’absence. (vidéo).

    extrait:
    …je suis brume lente, pensée de biais//
    ma douleur tangue sur la main, opaque comme veines//
    regarde la folie courir sur les doigts, mais palpe-la donc//
    vulnérable peau ne retient les visages//
    ils me reviennent et hantent…

    le texte de cette vidéo est également à lire ici:
    https://graciabejjani.fr/2019/07/30/jaboie-labsence-video/

  • entre tes poings. (vidéo).

    extrait:
    …reviens, avant//
    elle dit, voix basse, courte//
    honte de quoi//
    tu supplies et ça condamne//
    ta voix d’à peine…

    le texte de cette vidéo est également à lire ici:
    https://graciabejjani.fr/2019/07/30/entre-tes-poings/

  • un deux.

    papa papa papa
    exulte l’enfant
    calme-toi calme-toi
    voix du père

  • sommes-nous (3)

    on égare les phrases
    sur des visages crevasses
    sommes-nous monologues de silence
    syllabes solitaires et inanes répétitions
    on tremble des mots, servitudes de paupières
    sommes-nous déjà le silence à venir
    sourdines de nos aimés
    on tremble
    terreur ordinaire
    on tremble

  • sommes-nous (2)

    sommes-nous désormais histoires
    inaudibles au présent
    sommes-nous récits radotés par des joues marmotte
    mélodies de fantômes plus coriaces que fatigue
    sommes-nous désormais spasmes de filiation
    scellant ciel et monts comme distance entre les vies
    branches en fuite devant le désarroi de nos enfants
    on tremble
    on tremble comme peau.

  • sommes-nous (1)

    sommes-nous encore contenus par nos peaux
    corps brassés, os apathiques
    nos heures carapatent aux parages
    vies oubliées des verticales.

  • écrire : tenir un peu.

  • on s’épuise aux seuils…

    on s’épuise aux seuils de lieux hallucinés
    obsessions de mémoire exsangue de souvenirs
    mais seule la vie, la vie malgré tout

  • seules herbes et ronces chatouillent ma présence

    je m’ébruite à distance, absorbée
    déjà avalée par cieux
    je, abstraite forme
    baroques couleurs asservies au décor
    seules herbes et ronces chatouillent ma présence

  • écrire l’écrire, marges et tréfonds (9)(vidéo).

    écrire. (9)

    extrait:
    …écrire en fossoyeur d’illusions//
    casser le sol, son agitation, les certitudes//
    poussière au présent, gravats de pensées//
    écrire, acharnement en marge//
    morsures d’estomac et rauque faim…

    le texte de cette vidéo est également à lire ici:

    https://graciabejjani.fr/2019/07/05/ecrire-lecrire-marges-et-trefonds-9/

  • Gilles Bonnet, «Spectralités de la littéraTube»

    Fabula / Les colloques, La littératube: une nouvelle écriture?

    https://www.fabula.org/colloques/document6282.php

    extrait: « (…)Le ressassement caractérise le plus souvent ces œuvres de vidéo-écriture, tel l’«obsédant ressac» que note Gracia Bejjani dans sa série «Petite Fantôme»: c’est que le ressassement serait le fruit d’une énonciation propre au virtuel, si ce dernier comme le souligne Deleuze dans Différence et répétition, se caractérise par la multiplicité des possibles quand l’actualisé, à l’inverse, se réduit à l’unicité de ce qui a pris sa forme définitive. L’épisode 3 de «Petite fantôme», intitulé «Se dira dira pas se dira pas» consiste ainsi en un plan fixe sur un feu et ses braises, ou plutôt sur l’espace entre les bûches en train de brûler. Et le texte en surimpression de confirmer que l’objet de la quête demeure bien «l’absence entre/qui balbutie» (0’23). (…) >>>lire la suite sur Fabula
    -article rédigé par Gilles Bonnet que je remercie vivement-

  • écrire l’écrire, marges et tréfonds (9).

    écrire l’écrire, marges et tréfonds
    allant de muscles, de bruits qui creusent
    écrire, adjuration de bouches
    ventre gros de minutes aux aguets d’écrire
    corps-orages tournent en rond
    faste platitude des surfaces
    écrire, comme on griffe les peaux qui grattent
    furie d’ongles, éclats de joie
    écrire, labourer entrailles et parfois rien
    effervescence, usure, écrire ingrat
    on enfonce bras et langue dans la tourbe
    on absorbe, recrache, ça change quoi?
    écrire d’une main sonore
    doigts épouvantés, délicate crasse de soi
    ça distille les confins du réel
    fracasse prosaïques journées
    textes tavelés d’émotion
    écrire, détruire terre en ses tréfonds
    essaim de visages par fuite de regard
    ça se cogne à la complaisance
    écrire en fossoyeur d’illusions
    casser le sol, son agitation, les certitudes
    poussière au présent, gravats de pensées
    écrire, acharnement en marge
    morsures d’estomac et rauque faim
    ça cahote, demeure.

    la vidéo réalisée avec ce texte est également visible ici:


    https://graciabejjani.fr/2019/07/07/ecrire-lecrire-marges-et-trefonds-9-video/
  • tu immobilises mon errance (vidéo).

    extrait:
    …je t’envahirais//
    diaphane cannibale//
    t’emplirais langue//
    mais tu immobilises mon errance d’un geste//…

    le texte de cette vidéo est également à lire ici:
    https://graciabejjani.fr/2019/06/30/tu-immobilises-mon-errance/

  • fin de journée, mer veille.

  • tu immobilises mon errance.

    entre ton épaule, ton cou
    peau me mord
    tes creux, flux sur mes paupières
    je me perds
    le temps désormais ombres, morceaux de toi
    ténu instant entre épaule et cou
    je m’égare
    seule ton embrasure
    courbe rescapée d’un envol de cheveux
    comme habit qui tombe et nudité
    ta peau, ses grains
    je me suspends à l’absurde
    t’aimer en ce frêle lieu de toi
    lignes et biffures de raison
    m’abîmer, cavité entre épaule et cou
    ce ne sera pas baiser
    mon ardeur, lèvres briguées par ta transparence
    idiote d’amour
    je t’envahirais
    diaphane cannibale
    t’emplirais langue
    mais tu immobilises mon errance d’un geste
    ta main me déconcerte
    tes doigts à peine et je suis toute
    échouée sur ton regard impavide

    la vidéo réalisée avec ce texte est également visible ici:

    https://graciabejjani.fr/2019/07/03/tu-immobilises-mon-errance-video/
  • par terre.

    Le sol c’est pieds et mains, le sol c’est peau qui colle et claque, sol présence sous soi et ça rassure tu ne tomberas pas plus bas que sol, le sol ton corps autre quand tu titubes ou quand elle n’en peut plus et tu passes de ses bras chauds et mous comme nourriture à la dureté du carrelage, maman ne peut plus te porter, soupire -elle pèse de plus en plus lourd, elle grandit ma fifille- tu glisses de son bassin au sol, elle te pose et tu as peur d’un jour trop grandir -bientôt je ne pourrai plus, elle dit parfois- quand elle renoncera à te soulever, pas de sa faute si tu es trop lourde, tu te vois abandonnée au sol, qui pour te relever, qui pour t’oublier, pour te distraire de l’affreuse attente tu ramasses tout -puissant aspirateur cette gamine, dit maman en riant- elle te tape les mains pour que doigts lâchent ces petites choses du sol encore plus petites que toi, ces minuscules, ton plaisir à les briser entre pouce et index, les transformer en encore plus petits que petits, gestes stoppés par les hurlements de maman quand tu approches de tes lèvres quelques miettes, elle t’attrape de lestes mains comme si tu devenais petitement légère, tu capitules bienheureuse de retrouver sa peau, malgré vertige et douleur d’être secouée ; parfois c’est toi qui hurles, détresse devant le gros cafard qui surgit de tu ne sais où, qui te salue du balancement de ses antennes, tu louches et hurles devant le noir lustré de son corps, entre fascination et horreur, hantée encore de son bruit de mort, craquement qui s’est logé dans ton ventre quand papa l’a écrasé pour te rassurer, ton papa qui a transfusé la peur dans ta tête en voulant t’en délivrer ; ton papa, ses bras qui à d’autres moments te jettent dans les hauteurs, dans les airs comme au sol, c’est le même chuter, mais vers les nuages, corps propulsé, cœur qui dégringole, jubilation et angoisse de t’écraser au sol, te briser en marée rouge qui submerge le béton comme dans les films interdits qu’à peine tu aperçois, dans les airs comme sur terre, tu apprends et assimile la matière, sensation matière et audace de corps, tu hésites entre bonheur et terreur, entre plaisir à ressentir la fraîcheur du carrelage et dégoût des odeurs de tapis en hiver, effluves de terre que cette laine foulée qui déploie ses motifs complexes, tu t’y perds comme en un livre d’images. Le sol c’est terrain de jeu, cache-cache et tu te glisses sous le lit des parents, yeux fermés, des mains tu caresses le carrelage pour te sentir accueillie pendant qu’on te cherche, vont-ils se douter de ton refuge et s’ils t’oubliaient, il arrive à maman de ne pas trouver son briquet ou sa bague -et bien tant pis perdu c’est perdu, elle dit- dirait-elle de toi, perdue pour perdue ? tu vivrais alors sous leur lit-tente qui grincerait leurs secrets, tu partagerais leurs émotions, leurs mots, ils les laisseraient tomber à terre sans se douter de ta présence ; par terre c’est jeu avec les frères, aire de combats délimitée et bagarres arbitrées par décompte 10-9-8-7… te relever avant le zéro, quitter le sol, le sang battant au rythme inverse des chiffres 7-6-5-4…, le moment où tu capitules avant de perdre, capitules aux sonorités d’un chiffre, mais plus tu grandis plus les aînés te mettent rapidement à terre, te plaquent et tu t’immobilises sous la force de leurs muscles comme une insecte. Le sol c’est cette nostalgie de joies et de drames, enracinement d’orteils et explosion de limites, tes pieds nus empreintes de mémoire, les étés de ton pays chaud, terrasse de maison muée piscine, on abandonne la serpillère contre générosité d’eau, les seaux se succèdent et ton corps hilare se rue sur les jets, leur frappe aussi jouissive que les vagues des vacances, ta plante qui perd pied, à peine retenue par une peau qui ne sait plus séparer l’eau de la terre, distinguer flottement et sécurité. C’est l’insécurité qui remonte, souvenirs de sommeils collectifs et d’abris improvisés, un immeuble entier tassé dans quelques pièces, matelas au sol, on se tient bas en journée aussi avec le sot sentiment d’être protégé si le corps ne dépasse pas une certaine hauteur, se recroqueviller pour rester en vie, invisible des bombardements aveugles ; tu revois grand-père embrasser la terre de ses ancêtres, tu te revois émue qui dérives, tu te raccroches à l’idée de ses lèvres salies d’argile pour ne pas empoigner sa mélancolie tienne, tu ne veux pas de baiser trempé de racines, ses racines et quelles racines ; tu te préfères indienne, tu embrasserais la terre de l’oreille, la laisserais irradier en toi, te relier au plus lointain, il faudrait renouer par terre, descendre, plier : ce que ça te fait d’à nouveau t’agenouiller, de capituler de pleine grâce. Ou te refuser, ventre aplati contre le sol tu boudes, tu te fais poids, plus lourde que lourde, personne pour te secourir -je ne peux plus la porter, ils diront tous- plus grande plus lourde, sol de chair qui te colle, te colle à vie, tu finirais par te transfondre en lui, ton toi sol, tu boudes, tu boudes on ne te bougera pas, tu boudes comme mourir et retourner dans la terre, car tu es poussière, et tu retourneras dans la poussière.

  • ZeTMaG (publication)

    https://www.zetmag.net/

    Come explore our latest issue with its range of fascinating works related to Language(s) and Space(s) – with Nicolas Vermeulin, Balpe Jean-Pierre, Gracia Bejjani, Janan Marasligil, Lou Sarabadzic, Tanja Vujinović, Mez Breeze, Annie Abrahams, Saemmer Alexandra, Anna-Maria Wegekreuz, Eugenio Tisselli, Chris Joseph, Natasa Boskic, and Qianxun Chen

    Le thème de ce numéro de ZeTMaG est : Langu(ag)e(s)-(E)Space(s).​

    Ce numéro accompagne un colloque intitulé Languages INTER Networks, organisé par Erika Fülöp à l’université de Lancaster les 20-21 juin 2019.​​
    La durée de ce numéro 4.2 est de trois mois. Ce numéro reste ouvert jusqu’à fin septembre.​

    ZeTMaG, un espace ouvert aux expérimentations et aux réactions, une zone temporaire, en transit, en mouvement qui évolue dans le temps, va s’épandre, se condenser, disparaître et renaître.

  • me meus dans tes plis (vidéo).

    extrait:
    …je romps//
    m’altère en baroque nous//
    je tombe en toi//
    turbulente de toi//
    qui hantes…

    le texte de cette vidéo est également à lire ici:
    https://graciabejjani.fr/2019/06/16/me-meus-dans-tes-plis/

  • me meus dans tes plis.

    tu te tiens au seuil; m’étourdis déjà
    tu surgis, improbable
    au seuil et tu me précipites
    ébranles vie, barattes ses virgules
    et le clignement des instants
    je romps
    m’altère en baroque nous
    je tombe en toi
    turbulente de toi
    qui hantes
    tu pulses l’ombre
    tout geste est scansion de toi
    je songe, m’endors dans ton sang, le goût
    je me meus dans tes plis
    tu me creuses, m’éventres
    frétillements, ma fureur de toi
    mes heures se livrent à ta face
    les secondes dérivent de gravité
    me recueillir sur tes seuils, en vertige d’absence
    dans l’urgence désormais à renverser le réel
    et m’abasourdir sur ta peau.

    la vidéo réalisée avec ce texte est également visible ici:

    https://graciabejjani.fr/2019/06/16/me-meus-dans-tes-plis-video/
  • écrire l’écrire, ressac. (8)

    poursuivre écrire
    écrire ça ou rien
    ça… ou balbutier imbécile
    lèvres déchirées sur confus regrets
    et toujours cette main inquiète
    écrire escarmouche avec la vie, perdre à tout instant
    et assourdir le clivage vivre mourir
    écrire par reflux
    silence, ça pulse
    écrire, retenir son souffle; jeu de précipices
    écrire pour le salut, pour le saut; pétri de foi
    écrire pour épuiser vivre et s’y épuiser
    pour raidir les dialogues par des voix sans adresse
    écrire et répéter l’oubli, commémorations s’entêtent
    relire le journal de ses 13 ans, on écrit encore ce qui s’écrivait déjà,
    qu’on a oublié avoir écrit, déjà là, tout est déjà là
    comme on dirait des enfants et que tout se joue avant 7 ans
    écrire alors pour casser l’écriture
    cet engrenage vénéré qui vrille l’âme au vent des jours
    écrire et briser la langue, ses morceaux ne seront pas mots
    refouler les belles phrases, que se taisent les spasmes de soi
    écrire pour éviter dire
    quitter l’humain et sa conversation
    se faire points suspendus qui n’attendent pas,
    à la trame de textes sans intention
    écrire et s’égarer dans les palimpsestes
    on a tant foulé de pages que le sang ressasse marées de corps
    écrire ce qui parfois se trace sans les dents
    s’estompe sans s’inscrire
    écrire, sans livre à venir.

    la vidéo réalisée avec ce texte est également visible ici:

    https://graciabejjani.fr/2019/02/03/ecrire-lecrire-ressac-8/
  • relents de folie, quand la langue renonce.

    au téléphone, la voix du frère poursuit
    la parole est baume il pense, et poursuit
    mais les mots se fichent du sens
    ce qui se dit, sitôt brisé
    l’essentiel a précédé
    sa frappe acide
    lapidation par la langue
    échos pierreux
    le cœur ne sait plus, enserré de douleur
    cœur piétiné
    hébété d’impossible
    dans la résonance métallique d’une phrase en boucle: annonce de drame
    depuis, ta salive engourdie, lourde
    bouche lacérée, sang de plomb
    tu réponds, pour que se taise la voix
    toutes voix dehors
    la bienveillance est cacophonie
    faire éclater la peau
    claquer les mots
    ils ne sont plus soutenus
    hurlés, parole animale
    aussitôt aspirée, gouffre de corps
    le tourment est dissonance
    relents de folie, quand la langue renonce
    ultime rupture.

    la vidéo réalisée avec ce texte est également visible ici:

    https://graciabejjani.fr/2019/05/30/relents-de-folie-quand-la-langue-renonce/
  • l’empreinte.

    Je te rêve.
    Tes yeux seraient bleus, ton regard, poigne.
    Tu cours, fuis. Ton corps dans mon sang.
    Ton visage. Vie aussitôt; ses questions.
    M’inquiéter de ton avenir avant que tu n’adviennes.
    Tu n’es pas.
    Je t’écoute, te soulève. Tu joues. Ris. N’es pas.
    Tu densifies l’instant. Je te rêve. Tes odeurs, tes yeux.
    Tu es. À portée de chair. Tu es.
    Tu es ma prétendue chair. N’es pas.
    Ta vie te précède.
    Ton existence devance ma raison,
    et la triste épreuve du réel.
    Tu n’es pas. Ne seras pas. Ton avenir est mon passé.
    Tu es désormais obsession.
    Tout détail est annonce,
    signe de vies qui se refusent à chaque mois.
    Tu es impossible à attendre, présence de tous les temps.
    Tu as toujours été, m’aurais-tu précédée.
    Je n’attends que ta matière, ta confirmation.
    Ta venue me délesterait de l’empreinte.
    Tu as toujours été, mon corps porte ta forme,
    je te couve en creux.
    Tu as toujours été. Masse en moi.
    Tous les mois, tout est indice de toi. Marque de toi.
    Tous les mois, tu es possible. Je suis conviction.
    Puis désenchantement.
    Le temps de ce silence est vacarme de sang.
    Le sang à nouveau.
    Le sang qui m’affirme par négation.
    Premières règles, «tu n’es pas un garçon, mon adolescente».
    À présent l’autre ritournelle scande les cycles : «tu ne seras pas mère».
    Peut-être le mois prochain? Je suis ton entêtée.
    Tous les mois, au balbutiement de tout retard.
    Tous les mois. Toute nausée annoncera la joie à venir.
    Tous les mois, il est possible d’y croire, grâce m’est donnée.
    Tous les mois te préparent, te clament.
    Tu es. Tu es ma certitude.
    Tu es le credo de tous les après.
    Mais le sang revient, m’entache de douleur.
    Crampes et déchirements me détournent de la perte.
    La seule souffrance,
    te perdre alors que tu n’es pas.

    petite fantôme (texte de la série vidéo, épisode 5)

    la vidéo réalisée avec ce texte est également visible ici:

    https://graciabejjani.fr/2019/05/18/lempreinte-5/
  • relents de folie quand la langue renonce (vidéo).

    extrait:
    …ce qui se dit, sitôt brisé//
    l’essentiel a précédé//
    sa frappe acide…

    le texte de cette vidéo est également à lire ici:
    https://graciabejjani.fr/2019/06/10/relents-de-folie-quand-la-langue-renonce-2/

  • marmelade de ténèbres.

    me tais
    bercée d’obscurité
    me coule, plomb
    nuit et ses instants cieux
    m’arrête, peau et chair mues par l’élan
    me fais vitre et derrière déroule des cailloux de vie
    nuit, je cesse de me mimer
    molle de tous sons tus
    me tapis contre, battue de cris
    aux heures canines
    me laisse mastiquer
    partout, les trous
    dentelles de questions
    questions d’avant rhétorique
    pourquoi je suis créée
    et d’autres pourquois, cortège de stupeurs
    de voix qui adjurent béance
    avec la foi pour s’autoriser dignes
    ma foi? je crois qu’il y a un mystère
    verbe, sa matière abstraction
    me tais, lourde de nuits
    récits abîmés de fatigues vénéneuses
    douce nausée des fins, fin d’yeux griffes
    quand la gorge ahane les mots
    m’abandonne aux tournants, sans la confiance des petits
    la nuit, son pouls dans mes pupilles inquiètes
    rivées à l’opacité
    ce quelque chose qui respire d’immobilité
    nous en dedans, rompus d’amitié
    mêmes nuits d’un exil l’autre
    instants textures comme nocturnes enfances
    langue écumée d’analogues secousses
    abattre les routes comme jadis le salon des parents endormis
    marmelade de ténèbres
    ça se traverse en tremblant
    le soir, c’est journée qui s’accroche
    qui ne sait pas s’effacer
    derrière la présence étale, ça poursuit
    brèches ensoleillées de solitude
    les tours s’entêtent à illuminer les verticales
    désirs se retournent
    la nuit est miroir
    les visages, paysages martelés à ses flancs
    hoquets d’histoires languissent sur les écrans.

    la vidéo réalisée avec ce texte est également visible ici:

    https://graciabejjani.fr/2019/02/24/marmelade-de-tenebres/
  • comme première rencontre, premier amour (vidéo).

    inspirée d’une page croisée en un trajet de métro: les émotions, les apprendre en français langue étrangère.

    extrait:
    …pour apprendre à être humain, si l’homme seul s’émeut//
    langue maternelle en miroir, on interrogera la tristesse//
    triste c’est triste, on sera rassuré…

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    https://graciabejjani.fr/2019/05/19/comme-premiere-rencontre-premier-amour-2/