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terre déroute.
puis c’est terre
terre comme peau
terre comme déroute
et mer par repli
on répète le retour, de nouveaux départs
filmer, pays à bout de bras
on virevolte en interstices de pays
moelle captive dans l’entre-deux
on serait tension de mouvement
toujours on revient
on sait qu’on n’y est pas, mais on n’en est jamais parti
on répète le retour comme le reste
l’amour aussi, outrance
la vie est pour après, on s’y prépare
elle mijote dans nos os
rengaines, torpeur du relatif
on espère trébucher sur la foi
l’approche de la terre, c’est distance
le réel se réfracte
se délite dans l’immense, dimension d’humain
s’éprouver descendre
c’est terre
plus loin si seulement
quitter, revenir c’est écarteler l’espace,
tendre des mers devant soi
leurs tréfonds, les nageoires de leurs animaux
mais le temps ne délie pas
la mémoire est pouls
son rythme, gravité horizontale
on regarde, sourdine
on bat à l’aplomb du lien
à distance si seulement
déployée sous soi, la substance pays
agitations d’humains, sillons et récits
c’est terre comme derme harassé
on prend mélancolie, gaité au cœur
on peut la mélancolie si on est joie et ça se fiche de preuves
terre sienne, on la hume
on la mangerait pour s’y confondre, terre
le temps, son espace béance
on n’est pas assez loin
pays voltige dans le corps
ses hôpitaux, les décharges de ses poubelles
les écoles, les cieux et leurs nuages
on n’est pas assez loin
les ailes, babillages affolés
les stations d’essence, fumées s’attardent
combien d’herbes diaphanes
d’escargots qui transfigurent le temps
combien de corps, de langues, d’histoires
de grues qui suçotent les azurs
combien de prisons, de chiens qui tournent en rond
de nouveau-nés extasiés de vie
de rideaux qui fuient par les fenêtres.la vidéo réalisée avec ce texte est également visible ici:
https://graciabejjani.fr/2019/03/16/terre-deroute/ -
marmelade de ténèbres. (vidéo)
extrait:
…verbe, sa matière abstraction//
me tais, lourde de nuits//
récits abîmés de fatigues vénéneuses//
douce nausée des fins, fin d’yeux griffes…le texte de cette vidéo est également à lire ici:
https://graciabejjani.fr/2019/05/27/marmelade-de-tenebres-2/ -
écrire l’écrire, ressac (8). (vidéo).
écrire. (8)
extrait:
…écrire, retenir son souffle; jeu de précipices//
écrire pour le salut, pour le saut; pétri de foi//
écrire pour épuiser vivre et s’y épuiser//
pour raidir les dialogues par des voix sans adresse …le texte de cette vidéo est également à lire ici:
https://graciabejjani.fr/2019/06/11/ecrire-lecrire-ressac8/ -
public privé. (4)
le lien, aux confins de soi
on est aussi seul que soleil et ses excès. -
public privé. (3)
présence se passe de mots.
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public privé. (2)
conte de faits divers, halluciner la Seine.
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un regard de sel. (vidéo)
petite fantôme. (4)
extrait:
…ça mastique «miracle» l’œil vide d’enchantement//
comment croire alors au miracle?//
je veux taire ton corps décousu//
entamer mes longues ténèbres, de suite…le texte de cette vidéo est également à lire ici:
https://graciabejjani.fr/2019/01/27/un-regard-de-sel/ -
public privé. (1)
vêtir la couleur, habiter le seuil.
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aplomb perdu (vidéo).
extrait:
…et les trous de l’obscurité ne sont pas lumières//
mais balbutiements dans le silence des langues//
c’est qui ton pays//
la question a du retard, l’exil s’est déporté…le texte de cette vidéo est également à lire ici:
https://graciabejjani.fr/2019/01/05/jai-rate-lavion/ -
déformations professionnelles. (2)
nul n’est irremplaçable lui dit-il de son timbre droit comme horizon d’hiver.
elle voit aussitôt les visages: parents enfants aimés… pourquoi alors effroi de mort? -
carte en l’air.
et la porte s’ouvre; corps devant et les battants s’écartent; voix au robot et ça s’exécute. et ces gestes, d’halluciner puissance.
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déformations professionnelles. (1)
à force de réfléchir rebondir réussir, il pense que l’amour se discute s’ajuste; que la vie comme un dossier se gère.
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aplomb perdu.
j’ai raté l’avion
confondu partir et arriver
Beyrouth, Paris en un seul horaire, ramassés
c’est qui ton pays me demande petit frère
j’ai raté l’avion, ici on nomme les tempêtes
prénoms de femmes, ça humanise le chaos
sommes-nous aussi des tempêtes contre la nature déchaînés
à bout de bras, le téléphone débite ordinaires horreurs
éclats de partout, mitraillette d’opacité
Beyrouth, le monde dans ma paume coffrés
univers à l’étroit, ça se calcule en pouces
et mes yeux regardent la vie
comme enfant, bestioles en sa main ramassées
mirage de distraction pour farder les drames, les disperser sous chair
et la faute, la faute qui colle, cristallise l’impuissance des sourires
nuit et la nuit c’est seulement nuit
Paris-nuit Beyrouth-nuit en un même espace recueillis, sur nuit dépliés
et les trous de l’obscurité ne sont pas lumières
mais balbutiements dans le silence des langues
c’est qui ton pays
la question a du retard, l’exil s’est déporté
tu es qui de qui part, de qui arrive, de qui est, et ce qui en reste, et qui tu es, qui
la nuit, pays est mon pays et les questions sont usées
j’ai raté l’avion en un instant d’absence
le geste est absurde, comme fragilité d’homme
comme smartphone, entre nos doigts
ce soir sa surface lisse rayonne de désastres
ça crachote les nouvelles par rafales
ça s’acharne à exterminer la joie, la petite joie idiote, joie-vie
et j’ai misère humaine, plein la bouche
friabilité d’être, ras-le-nez
un avion manqué, mais la terre surtout
et l’aplomb, perdu.la vidéo réalisée avec ce texte est également visible ici:
https://graciabejjani.fr/2019/01/12/aplomb-perdu/ -
injonctions paradoxales. (4)
nos empreintes jusqu’aux cieux, intrications de vains possibles, quand seul le vide de l’horizon élève, se dit-elle reportant regards sur terres embouteillées.
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complaisance ton geste.
complaisance ton geste, tu traverses les liens;
sans mots, traces pour te contenir;
atrophié de toi qui ne sais plus advenir;
qui peines à mouvoir ton corps d’ogre sans poésie d’ogresse;
quand complaisance. -
ça compte.
il compte ses frites, sans yeux, sans signe à alerter la mère; il compte combien et s’il a été mieux ou moins servi que ses frères et quel frère on lui préfère et si aujourd’hui c’est lui qu’on aime; il compte sans broncher rien ne le trahira; il compte, ça prend l’instant.
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injonctions paradoxales. (2)
l’exil, cet horizon déplacé qui toujours te longe. blanche présence, ne se rejoint pas. te densifie, là; édifié de paradoxes.
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injonctions paradoxales. (1)
•la mère: yiii que tu as grossi!
•l’enfant: …(plaidoyer trop long trop confus, ne sera pas repris ici)
•la mère: tu n’as pas goûté à ce plat! comment ça tu as assez mangé? goûte au moins! et celui-ci, je l’ai préparé pour toi! tu prendras bien un dessert? comment ça non? -
taxi-liban.
•taxi: je parie que ça fait de nombreuses années que vous n’avez pas mis les pieds ici!
•moi: je viens tous les 3 mois
•taxi: mais vous filmez tout! vous n’arrêtez pas! pourquoi? pourquoi vous filmez la route, les voitures? quel intérêt? -
dans tes creux.
entre deux os
dans ton dos
contre ta rudesse
ma chair se rejoint.
ta douceur, déposée
moiteur intime
la suavité, combat à deux. dans tes creux. -
dialogue en fuite (3).
Et moi, je serais la Conchita! Je te jure! «Tu peux faire le linge, une machine. Rien à manger, il n’y a rien à manger». Voilà! Y avait que ça. Et des indications pour le linge sale. Voilà le seul mot que j’ai trouvé! Pour une fois que je passe chez les parents, c’est le seul mot que je trouve. Je te jure! Tandis que l’autre là! Le Tanguy de sa mère, c’est nourri, blanchi ! Et ça ne les gêne pas. Et moi, une Conchita! Je te promets! Qu’on lui trouve une meuf à celui-là et qu’on n’en parle plus! Oui qu’on n’en parle plus! Une meuf, c’est ce que lui faut! On n’a pas idée, à son âge! Scotché chez ses parents, à rien foutre! Et ça ne les gêne pas. On ne lui demande rien, je te jure! Je parie qu’il ne sait même pas faire des pâtes, celui-là. Je ne sais pas quelle meuf en voudrait, d’un parasite comme celui-là! Ça ne m’étonne pas qu’il reste collé à sa maman! Pourquoi veux-tu qu’il parte? Et moi? Moi, leur fille aussi, on dirait pas! Rien à manger. «Tu peux faire le linge». Tu parles de parents!
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dialogue en fuite (2).
– Une tour Eiffel!!!
– « La » tour Eiffel
– Ben j’en ai vu qu’une! -
dialogue en fuite (1).
– Il est au courant?
– Pas vraiment, vaguement.
– Tu ne peux pas lui en parler? Vous avez un enfant, vous êtes mariés.
– Ça change quoi?
– Comment ça? Vous êtes ensemble depuis un moment non? Tu ne lui en as jamais parlé?
– 7 ans. Le reste, c’est du passé, ça ne le regarde pas. Et je ne me sens plus concernée. Non, fini tout ça. Pourquoi, tu en parles toi?
– Un peu, dans les grandes lignes. Puis il lira mon livre un jour, si je suis publiée; c’est le but. Même passé, ça fait partie de mon histoire, de moi. Alors, tu vois.
– Pas moi. Ce n’est pas que j’ai honte, c’est pas comme tu crois.
– Je ne crois rien, je me demande juste pourquoi. Même que j’ai honte moi, de toute cette période. Vraiment honte, je ne me pardonne pas. Beau essayé de comprendre…
– Tu n’as pas besoin de comprendre. Ce qui nous est arrivé nous est arrivé.
– J’ai fait un travail sur moi, après. Important, impossible d’en échapper sinon.
– Pas moi. Maintenant c’est fini, c’est clos tout ça. Définitivement, je n’ai rien à faire là.
– Même pas dans les mots? En faire quelque chose avec les mots, de tout ça. Non? Même pas?