grève(s).

c’est mieux que rien me dit-il ; rien n’est mieux que rien, je réponds convaincue, mais sans me comprendre. (49)

aujourd’hui corps parmi les corps, je suis tenue chaud ; humble humanité. (48)

fallacieux temps, ses 5 minutes suspendues chavirent 4 en 12 minutes d’humain ; en quai le cœur bat les secondes du pied. (47)

on s’habitue et les mots s’aplatissent ; je m’obstine, m’émiette brèves. (46)

de toute façon on doit rentrer dedans, dit la mère à l’enfant aux yeux figés, tu vas voir ça va bien se passer. (45)

où est-vous ? me sens aussitôt abandonnée. (44)

mono-maniaque mais si je ne l’écris pas je crève. (43)

ça finira par passer comme on dit de certaines saisons. (42)

l’annonce qui informe du mouvement social : lapalissade et oxymore (en quai, ça ne bouge pas). (41)

ce ne sont pourtant que simples trajets quotidiens. (40)

comme insectes écrasés sur parois de voiture, nos doigts pathétiques sur les vitres. (39)

quel surcroît d’humanité me retient de hurler frapper mordre ? (38)

on ne se parle plus, on raconte nos trajets. (37)

elle cherche la barre, m’arrache les cheveux ; rien de personnel. (36)

bande de sauvages, hurle la dame à qui tente encore, le dit après avoir foncé dans la masse pour en être ; relative humaine. (35)

petite joie comme merveille : finir par arriver. (34)

entre leurs bras agrippés à la barre, mon regard hagard. (33)

maudire ma peur du vélo en ville. (32)

je ne réponds plus à qui m’agresse, reconnaissante au silence de m’étreindre. (31)

rame en attente recueillie ; mes larmes sans raison. (30)

je me colle aux vitres ; voyager un peu dehors, comme au cinéma l’écran. (29)

stations fermées carapatent comme tunnels ; quais illuminés sur rien, personne. (28)

stations fermées, sentinelles de nos passages comme souvenirs désaffectés. (27)

fendre les stations fermées, comme traverser mélancolie d’abandon. (26)

lapsus de ce matin : on croise les doigts avec la guerre. (25)

pompons ou cheveux sur visage chatouillé et soudain le problème est dans les détails. (24)

miser sur le visage qui parmi nous gardera le sourire. (23)

nous sommes son spectacle ; du quai il nous filme, commune misère. (22)

arrêtez de bouger là ! il intime à mon corps hébété par l’entassement. (21)

jeune fille fait son crochet, de l’autre œil surveille les tunnels ; mailles, ses graines d’attente. (20)

un trou là là derrière vous, y a un trou ; humains, l’horreur du vide. (19)

mère serre sa fille contre elle, tête contre cœur pressés autrement que nous alentour. (18)

ma poitrine en étau de dos, comme citron cède ses larmes. (17)

mais ce n’est pas mieux chez vous, avec vos guerres, me dit-elle. (16)

ceux dedans sermonnent les autres qui essaient, du bout des yeux; mépris des parvenus. (15)

le gamin se rétracte mains, son jeu vidéo swingue entre mes jambes. (14)

yapireyapireyapire, ça chantonne dans ma peau, comme enfant d’autres ritournelles contre absurdes peurs. (13)

derrière mes paupières, vent, vagues, odeurs de thym; j’ai aussi connu ça. (12)

le regard des humains abandonnés à quai. (11)

la femme m’attire sur sa poitrine pour m’aider à rentrer; je m’abandonne, reconnaissante pour ses bras, gênée par son haleine. (10)

il est à qui ce sac et l’objet fleuri coloré papillonne au-dessus des crânes pour retrouver les bras perdus. (9)

comment éprouver encore les limites de soi, bassin coude fesses… dans la bouillie des corps. (8)

je me tasse toute, comme vêtements dans valise à craquer; les bras vigoureux des portes, éclairs de fermeture. (7)

speakerines des quais présentent leurs excuses dans toutes les langues, comme vœux en janvier. (6)

rues comme en été, humains vélos, ça trotte. (5)

j’envie les grands, nous ne partageons soudain plus les mêmes horizons. (4)

le jeune à côté s’accoude sur mon épaule, comme table à sa portée. (3)

fourbe, je me glisse entre les corps. (2)

mon visage mandibules, à l’approche du métro. (1)

#grève